Profession infirmier-e aout 2014 n°3

« Ceux qui luttent ne sont pas sûrs de gagner,

mais ceux qui ne luttent pas ont déjà perdu. »

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L’édito

L’actualité récente nous a conduits à produire un numéro spécial à destination des filières infirmières spécialisées.
« Ceux qui luttent ne sont pas sûrs de gagner, mais ceux qui ne luttent pas ont déjà perdu. »
Cette maxime illustre parfaite- ment le combat récent de la profession IADE pour le strict respect de leur droit. L’attribution du grade Master à tous les diplô- mé-e-s achevant leur formation d’IADE à partir de septembre 2014 n’était pas une lubie ou une revendication récente. Il s’agissait de faire simplement appliquer un décret dont le contenu avait été obtenu en 2010, déjà à l a f o r c e d u p o i g n e t . Nous entendons des mauvaises langues minimiser cette lutte au prétexte qu’elle ne rapportait rien et qu’elle était initiée par des étudiant-e-s qui rappelons le s’il le faut, sont à la base des professionnels.
Pourtant, ce mouvement sponta- né doit nous faire réfléchir. No- tre profession n’a pas engagé de mouvement de grande ampleur depuis 1988 alors qu’elle a subi des attaques frontales dont la perte de la reconnaissance de la pénibilité. Est-ce du au faible taux de syndicalisation, à une société centrée sur l’individu, à une profession féminisée victime de discriminations, au faux dé- bat des assignations ou à la no- tion de responsabilité vis-à-vis des patients souvent invoquée par nos collègues?
Nous pourrions décortiquer pendant des heures les causes de l’inertie pro- fonde qui plombe notre profession. En 2007 nos collègues finlandaises ne se sont pas posées autant de questions. Elles utilisèrent la menace de la démission collective afin d’obtenir un rattrapage salarial sur les employés communaux soit 350 à 650 euros d’augmentation par mois. Malgré la pression, 12800 professionnelles répondirent à l’appel du syndicat Tehy et obtinrent satisfaction à l’euro près!

Alors qu’une étude de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) évaluait au 1er janvier 2013 la population infirmière à 600.000 professionnels, comment se fait-il que nous soyons toujours classés dans la moyenne basse des salaires au niveau européen alors que nous pourrions inverser largement le rapport de force. Avouez que 600.000 IDE uni-e-s sur des bases revendicatives communes plongeraient les pouvoirs publics dans un certain embarras.

En outre, vu l’image positive dont bénéficie notre profession auprès de la population, nos concitoyens soutiendraient sans aucun doute un tel mouvement. Nos ainées des luttes de 1988 et nos collègues IADE vous le confirmeront, on n’obtient rien sans rien dans notre beau pays…
Tout le collectif infirmier du CHU vous souhaite de belles vacances et beaucoup de courage si vous êtes au travail. A bientôt dans vos secteurs.

IADE, IBODE, PUÉRICULTRICES

Des réformes « complexes », une reconnaissance professionnelle encore en chantier !

contre une indécente aumône, en sup-

En avril 2012, la CGT a déposé une requête auprès du Conseil d’Etat, ainsi qu’une question prioritaire de constitutionnalité pour contester le droit d’option mis en place en 2010 et concernant l’ensemble de la profession infirmière. La CGT a été déboutée. Le Conseil d’État a considéré que la profession n’était plus pénible et qu’il fallait abandonner cette reconnaissance. Cette proposition anticipait la réforme sur les retraites en retirant le droit au départ anticipé à 55 ans pour la filière infirmière.
Ce protocole indécent du 2 février 2010 entre la ministre de la santé Mme Bachelot et un seul syndicat, le Syndicat National des Cadres Hospitaliers (SNCH), syndicat ultra minoritaire regroupant moins de 1% de syndiqués IDE, ainsi que la circulaire du 30 septembre 2010 excluent les IDE du secteur privé d’une reconnaissance à qualification égale.
Le pseudo droit d’option qui s’en suivi, calamiteux de part son indécente revalorisation, a transformé une catégorie A de la FPH* en un « faux A ». La CGT a toujours combattu cette réforme qui allonge la durée d’activité
Une autre réforme est également à l’œuvre touchant les réingénieries des IDE spécialisés. Débutée en 2008 pour les IDE spécialisés, elle était orientée vers l’intégration des professions de santé sur le schéma européen LMD (Licence/Master/Doctorat). Le modèle d’universitarisation retenu en 2009 pour la profession d’IDE se voulait un com- promis. C’est grâce à la pression des syndicats, qui voulaient que les futurs diplômés soient formés par leurs pairs, qu’il a été possible de concilier les structures de formations existantes avec la reconnaissance d’un grade universitaire.
A ce jour, les référentiels de formations des IBODE et des puéricultrices ne sont pas achevés. Les parutions des rapports de l’IGAS* et de l’IGAENR* le 18 février 2014 n’ont rien clarifié, laissant ces pro- fessions orphelines de reconnaissance. D’autre part, un projet d’arrêté pré- voyant l’accès des IDE de soins généraux au diplôme d’IBODE par la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) a été examiné par le Haut Conseil des Professions Paramédicales (HCPP) le 17 décembre 2013. Le HCPP lui a donné un avis favorable à l’unanimité moins deux abstentions.

La CGT revendique pour les IDE spécialisés :

L’exclusivité de fonction des IBO- DE et puéricultrices à l’instar des IADE depuis le décret d’actes de 2002.
La reconnaissance en Master pour les IBODE et les puéricultrices comme pour les IADE.
Une réelle reconnaissance de la qualification et de l’engagement de la responsabilité pour tous les salariés, y compris les IDE évoluant au-dehors des secteurs en soins généraux (blocs, pédiatrie, etc.).
Annick Picard, IDE animatrice du collectif des IDE, IBODE et puéricultrices pour la CGT. Laurent Laporte, Commission exécutive de l’UFMICT-CGT.

VAE IBODE: Ques a quo?

L’arrêté relatif aux modalités d’organisation de la Validation des acquis de l’expérience (VAE) pour l’obtention du diplôme d’État d’infirmier de bloc opératoire a été publié le 7 mars 2014. Il précise les conditions d’accès au diplôme par la voie de la VAE. Le candidat doit justifier d’un DE infirmier et avoir exercé un certain nombre d’activités en rapport direct avec le diplôme d’IBODE durant 3 ans (équivalent temps plein) :

— au moins 3 activités dans le domaine intitulé « réalisation de soins et d’activités liées à l’intervention et au geste opératoire»;

— au moins 2 activités dans le domaine intitulé « réalisation de soins auprès d’une personne bénéficiaire d’une intervention » ;

— au moins 3 activités dans le domaine intitulé « mise en œuvre et contrôle de mesures d’hygiène en bloc opératoire et dans les secteurs associés » ;

— au moins 2 activités dans le domaine intitulé « mise en œuvre de mesures de qualité et de sécurité en bloc opératoire et dans les secteurs associés».

Le texte précise les conditions de recevabilité et définit le livret de présentation des acquis qui tient compte du référentiel de compétences.
Après dépôt du livret de présentation des acquis de l’expérience, le candidat est convoqué à un entretien d’une heure maximum avec le jury.
En cas de validation partielle, il dispose d’un délai de 5 ans pour enrichir son expérience professionnelle ou valider la ou les unités d’enseignement en institut dans le cadre de la formation préparant au diplôme, avec dispense des épreuves de sélection.

IADE : CHOSES PROMISES, CHOSES DUES ?

En 2010, peu après le succès des « 2èmes Assises infirmiers anesthésistes » organisées par l’UFMICT-CGT, débutait un mouvement social de grande ampleur au sein de la profession. Cette contestation faisait suite au chantage induit par la mise en place de la réforme LMD* et au refus d’attribuer d’un grade universitaire au diplôme d’Etat d’IADE.
Après plus d’un an de lutte, le mouvement s’est arrêté avec à la clé l’octroi par décret non négocié d’une simple prime pour les seuls IADE des établissements publics et la promesse de l’obtention du grade Master. Les cinq années d’études sur un cursus professionnel de sept ans pour obtenir le diplôme d’état devaient ainsi être réellement reconnues à leur juste niveau.

Quatre ans après, où en est-on?

Si en 2011 une enquête révélait que la majorité des IADE étaient plutôt satisfaits de leurs conditions de travail, force est de constater que ce n’est plus le cas.
La mise en place de la T2A*, les différentes réformes du financement des établissements de santé et la focalisation des décideurs sur la dépense publique du pays ont entrainé des restructurations engendrant la réorganisation des plateaux techniques et de l’activité anesthésique.
Les IADE ont vu la charge de travail augmenter de façon continue et ce à moyens humains constants voire à la baisse. Cette pression, s’ajoutant à la technicité et aux contraintes intrinsèques du métier, a généré plus de stress et une difficulté croissante pour concilier vie professionnelle et familiale: rappels fréquents sur des repos, journées à rallonge, heures sup. non payées ni récupérées, au mieux placées d’autorité sur des comptes à l’avenir incertain qui n’ont d’ « épargne » que le nom, vacances raccourcies ou fractionnées… La liste, hélas, est non exhaustive !
Il est urgent de remettre l’activité en adéquation avec les moyens humains et de reprendre en compte la qualité de vie de professionnels qui se consacrent aux autres.
Une profession scindée en deux
Suite au protocole « Bachelot », deux IADE ayant le même diplôme, travaillant dans le même service hospitalier et affectés aux mêmes taches sont rémunérés différemment et ne partiront pas en retraite au même âge. Au
-delà de l’interrogation sur la légalité d’une telle situation qui a amené la Fédération santé de la CGT à poser une QPC*, cela crée une inégalité de traitement inacceptable entre professionnels qui aurait dû être déjà sanctionnée.
Une profession toujours très féminine
Avec environ 70% de femmes, la profession d’IADE reste majoritairement féminine. De fait, quelles professions (hormis celles ou les femmes sont le plus représentées) subissent encore un décalage aussi flagrant entre leur niveau de responsabilité d’études et de rémunération ?
Quelles sont les professions qui voient leurs sujétions et pénibilité non reconnues voire niées avec autant de mépris ? Alors que la Ministre des droits de la femme ne sait plus quoi faire pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes au travail, nous constatons que la fonction publique hospitalière et les employeurs privés des IADE donnent l’exemple de ce que l’on ne devrait plus voir.

Une démographie non adaptée aux besoins

La population d’IADE s’accroit constamment. Pour autant sur le terrain cela n’est pas constaté et cette tendance ne suffit pas à couvrir le développement des activités chirurgicales et anesthésiques. Cela menace le niveau de qualité de prise en soins des patients et dégrade encore les conditions de travail comme la qualité de vie des soignants. A cette difficulté s’ajoute la chute démographique des médecins anesthésistes induisant un risque de glissements de tâches et de dépassements de fonction.

Ce manque d’adéquation entre le nombre de professionnels et l’activité exige pour être corrigé, une anticipation des besoins réels et des moyens qui devront être dégagés.
De même, toute évolution des pratiques et du domaine de compétences ne pourra se faire qu’en concertation et avec l’accord des professionnels concernés, dans un cadre législatif adapté et avec une réelle revalorisation salariale associée.

Une formation rénovée

Pour répondre aux exigences du grade Master, la formation déjà rigoureuse est devenue encore plus exigeante. Construite sur la base d’une spécialisation de la profession Infirmière ou sage-femme, elle exige toujours pour accéder aux 24 mois de formation de justifier d’un minimum de deux ans d’exercice professionnel et de réussir un concours sélectif.

Un cadre législatif à renforcer

Les IADE sont la seule profession au sein de la filière infirmière régie par un décret d’exclusivité de titre et de fonction. Cette exclusivité de compétence, garante de la pérennisation du binôme IADE-MAR* qui reste le socle de la baisse de la morbidité- mortalité anesthésique depuis plus de 20 ans doit être sanctuarisée.
Au niveau des secours pré-hospitaliers la place spécifique des IADE dans les Services de santé et de secours médicaux, des services départementaux d’incendie et de secours doit être reconnue. Également, la priorité donnée dans le Code de la santé publique aux IADE pour l’activité en SAMU SMUR doit être renforcée par intégration dans les décrets régissant les conditions de fonctionnement de ces services.
V. Porteous-Auge, IADE, animateur du collectif IADE pour la CGT.

PLATE-FORME REVENDICATIVE IADE

– Un corps unique d’IADE dans la FPH (IADE, cadres et cadres supérieurs IADE, Directeurs d’écoles).

– La reconnaissance de la pénibilité pour tous : IADE du public ou du privé.
– Un salaire reconnaissant enfin le niveau de qualification et de responsabilité pour tous : IADE du public ou du privé.

– Un décret d’exclusivité de titre et de fonction sanctuarisé.

– La réaffirmation de la place privilégiée des IADE dans les secours pré- hospitaliers.

– La prise en compte et le règlement de la situation particulière des sages-femmes anesthésistes. (Régis par l’Article D4151-14 du Code de la santé publique, ce sont des sages-femmes qui ont fait la formation IADE ou des IADE qui ont fait la formation sage- femme et qui travaillent soit en double compétence, soit en activité quasi exclusive IADE.)

– Une vraie visibilité des IADE (rôle et contribution) dans le système de santé.

A9R9EDC

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